QUESTIONS ET REPONSES


Question: Quels sont les karmas qu'engendre la pratique tantrique ?

Réponse: La pratique tantrique engendre deux types de karmas. Tout d'abord, le tantrisme s'établit sur un mensonge. Ensuite, il détruit le vrai dharma. Le mensonge génère de lourds fruits karmiques, tout autant que le fait la destruction du vrai dharma. Les maîtres du tantrisme veulent qu'on les croie et qu'on les respecte ; ils s'imaginent aussi, parfois, qu'ils vont se réincarner dans les corps de cinq personnes différentes, afin de pouvoir aider les autres. Je vous laisse réfléchir : leur est-ce possible ? (l'auditoire réfléchit). Laissez-moi vous donner la réponse : c'est non. Les maîtres tantriques affirment qu'ils vont se réincarner de nouveau. Est-ce possible ? Oui, absolument, car chaque être vivant continue sans cesse de se réincarner.

Vous aussi, vous vous êtes déjà réincarnés. Or, si vous vous êtes réincarnés dans cette vie, un maître tantrique le fait également, comme vous, car les maîtres tantriques et vous n'êtes pas sortis encore du cycle des réincarnations. En conséquence, ces maîtres disent assurément la vérité quand ils affirment qu'ils vont se réincarner.

En revanche, se réincarner et apparaître à travers plusieurs personnes à la fois, est un mensonge pur et simple. Pourtant il est possible à un individu de se réincarner dans plusieurs personnes au sein de ce monde du désir : cela reste faisable, mais c'est réservé à ceux qui sont parvenus au-delà du huitième niveau de bodhisattva. À partir du troisième niveau complet de bodhisattva, l'individu peut prendre diverses apparences, mais ce ne sont que des images, et non des corps vivants. Il ne s'agit encore que de la projection d'une image intangible. Pour pouvoir se réincarner en cette vie à travers plusieurs corps à la fois, il faut avoir dépassé le huitième niveau de bodhisattva. Au troisième niveau complet, le pratiquant dispose d'une grande sagesse et de pouvoirs surnaturels, mais il n'est pas capable encore de se réincarner en plusieurs personnes. Comprenez bien que le maîtres tantriques sont loin d'être illuminés : ils n'ont d'ailleurs pas encore atteint le dixième niveau de la pratique, ils ne connaissent pas encore la sagesse du premier niveau de bodhisattva. Comment peuvent-ils alors affirmer qu'ils peuvent se réincarner à travers plusieurs corps de chair ? Lorsque le premier Dilgo Rinpoche a dit qu'il allait, à sa mort, se réincarner dans cinq personnes, il a proféré un mensonge immense. Ce n'était que son imagination, et c'est en vue que les gens aient confiance dans le lamaïsme tantrique, qu'il a répandu ce mensonge.

Ces gens ne sont pas illuminés, mais affirment le contraire. Toutes conséquences qui permettent de devenir un bouddha ne se sont pas réalisées, mais soutiennent être devenus des bouddhas. Les méthodes qu'ils emploient le plus fréquemment sont des publicités entre amis : « J'affirme que tu as atteint le niveau de bouddha, mais je ne dis pas quant à moi que je suis déjà un bouddha : c'est toi qui t'en charges ; quant à moi je me charge de dire que tu es déjà un bouddha. »

Dans le sutra Pu Sa Ying Luo Ben Ye Jing[1], il est démonté que ce genre de boniments est très grave, et se range parmi les dix crimes graves dont fait état le bouddhisme[2] et pour lesquels aucun repentir n'est possible. Après qu'ils seront décédés, ces maîtres iront inévitablement en enfer. Imaginez que quelqu'un ait propagé un grave mensonge et que, à cause de son karma, il soit descendu en enfer. Comment, alors, peut-il posséder encore des pouvoirs surnaturels et être capable de se réincarner en plusieurs personnes dans cette vie-même ? Par ailleurs et surtout, l'enfer dure très longtemps, et si ces individus dont nous parlons souhaitent revenir dans ce monde, il leur faudra d'abord se réincarner en tant que bêtes, puis en tant qu'esprits malveillants, et après avoir seulement liquidé tout leur mauvais karma, ils pourront renaître dans ce monde en tant qu'êtres humains, mais alors ils seront pauvres, ignorants et de peu d'intelligence. C'est pour cette raison que la deuxième réincarnation de Dilgo Rinpoché ne correspond absolument pas à la première génération de Dilgo Rinpoché. Ils ont simplement trouvé quelqu'un d'autre pour le remplacer. Les maîtres tantriques ont répandu de grands mensonges, ils n'ont pas respecté les préceptes bouddhistes. En ce cas, comment pourraient-ils renaître dans ce monde en tant que humain ? Je vous laisse y réfléchir. Le maître Xuan-Hua a défendu l'idée que dix mille tathagatagarbha de fourmis équivalaient au tathagatagarbha d'une seule personne ; que mille tathagatagarbha d'êtres humains équivalaient à celui d'une baleine. Le maître Xuan-Hua s'est fourvoyé, il n'a pas su expliquer la véritable signification du tathagatagarbha. Il n'a certes pas nié, comme l'a fait le dalaï lama, le tathagatagarbha. Mais en commettant cette erreur il est allé dans la dimension des esprits malveillants. Malgré ses pouvoirs surnaturels, il n'est pas parvenu à se sauver lui-même. Considérons les maîtres tantriques, qui détruisent le vrai bouddhisme par leurs méthodes hérétiques et leurs boniments : Comment peuvent-ils échapper à leur propre karma ? Lorsqu'on considère le dalaï lama, depuis la première génération, on note qu'il a nié les bases du vrai dharma qu'est le tathagatagarbha, qu'il a nié le chemin de bodhisattva. Comment pourrait-il se réincarner dans ce monde d'une génération à l'autre ? Comment pourrait-il être le roi du dharma à chacune de ses réincarnations ? Ils sont tous en enfer. En réalité, les enfants qui se sont réincarnés en chaque dalaï lama, ont toujours été différentes personnes. Ceux qui les ont élus ont simplement admis un enfant parce qu'il avait choisi un objet ayant appartenu à l'ancien dalaï-lama.

En un temps extrêmement reculé, il y a de cela de nombreuses vies passées, j'ai calomnié un véritable maître illuminé, en sorte que je me suis retrouvé dans le monde des animaux. C'est en rat que je me suis réincarné. Les fruits karmiques sont réellement d'une puissance incontournable. J'avais heureusement accumulé de bons fruits, et je m'étais immédiatement repenti et juré de ne plus jamais calomnier les vrais maîtres. C'est ainsi que j'ai pu retourner parmi les êtes humains. De fait, le rat que j'étais alors n'a pas eu le temps de créer une famille : un chat l'a capturé ! Je suis retourné ainsi très rapidement dans le monde des hommes. C'est pourquoi ce chat a été, à cette époque, mon sauveur : il ne m'a pas laissé vivre mes vieux jours en tant que rat, il a contribué à me faire retourner dans le monde des êtres humains. Désormais, si je n'ai pas de preuve concrète, je n'ose plus formuler la moindre critique envers un maître, quel qu'il soit. Regardez donc les maîtres tantriques : ils ont profondément déformé l'enseignement du Bouddha. Il est clair que, à cause de leurs fruits karmiques, ils devront se rendre en enfer. Le maître Xuan-Hua est un maître que je respecte beaucoup, il suit correctement les préceptes ; seulement son explication du vrai dharma est maladroite ; d'ailleurs il a déjà payé les conséquences karmiques de ses erreurs. Les maîtres tantriques doivent prendre exemple sur l'expérience du maître Xuan-Hua, parce que cet exemple illustre la puissance du karma, les maîtres tantriques doivent prendre le cas du maître Xuan Hua en considération. C'est pour cette raison également que, dès l'instant que je cherche à montrer les erreurs des autres maîtres et ce qu'est le vrai dharma, je fais preuve de la plus grande prudence. Avant de pouvoir critiquer, je dois avoir des preuves à l'appui de mes propos : j'ai très peur de devenir de nouveau un rat ! Il sera trop tard en effet, à notre mort, pour corriger les fruits karmiques qui y apparaîtront. C'est terrible !

Si jamais vous n'avez pas accumulé de mérites et que vous tombiez en enfer, cela revient à dire que vous recommencez votre pratique à zéro. Le sutra Pu sa Ying Luo Ben Ye jing précise que si nous commettons, au moment de quitter la vie, l'un des dix crimes graves qui y sont mentionnés, nous perdons les trois niveaux de sainteté et les dix niveaux de bodhisattva. On recommence la pratique à zéro. Il est tout à fait inutile de commettre ces exactions ! Calomnier l'enseignement des vrais maîtres ou formuler, sans avoir de raison de le faire, des critiques au sujet de leurs actions, de leurs paroles et de leurs pensées, génère de lourdes conséquences. Il existe des gens qui, sur internet, ont vraiment osé diffamer. Ils ont simplement écouté les calomnies que proféraient d'autres personnes, et, du coup, les ont rapportées sur des sites internet. Quelqu'un a publié des écrits sur internet. Il y a écrit : L'enseignement du maître Xiao PingS, s'il s'avère qu'il est juste, je préfère encore aller en enfer. » Il a vraiment osé écrire cela. Il a tout bêtement mis sa confiance dans les accusations d'autres personnes, il a osé jouer avec sa future existence, uniquement dans le but de satisfaire ses propres impulsions immédiates et de montrer qu'il était courageux. Il a fait ce genre de paris. C'est vraiment idiot.

----

Question : Pourquoi la septième vijñāna est-elle parfois propre, et pourquoi arrive-t-il qu'elle ne le soit pas ? Comment fonctionnent les graines karmiques non-contaminées par rapport à la septième vijñāna ?

Réponse : Il peut arriver que la septième vijñāna soit propre, et il peut arriver qu'elle ne le soit pas. Même la septième vijñāna d'une personne étant parvenue au niveau de grand arhat, peut parfois n'être pas propre. Prenons l'exemple d'un moine nommé Nanda, dont le corps présente trente signes du grand homme[3]. Il est solennel, il exerce sur les femmes une forte attirance, et toutes veulent l'approcher. D'ailleurs, lorsqu'il donne des conférences, ce sont les femmes qu'il regarde d'abord, avant de considérer les hommes. Tout à l'heure, lorsque je suis entré ici, ai-je regardé les hommes ou les femmes d'abord ? (tout le monde rit) Je ne m'en souviens plus, je n'ai pas fait attention. Le moine Nanda, quand il approche du public, doit d'abord saluer les femmes, puis les hommes. Cet exemple révèle une septième vijñāna qui n'est pas propre. De quel trouble s'agit-il ici ? De graines karmiques contaminées qui ont formé une habitude. Ces graines karmiques de l'habitude font partie des énergies sur lesquelles travaillent les bodhistavas. Les arhats ont tout simplement cessé de faire apparaître les fruits de ces graines karmiques. Mais les graines karmiques de l'habitude demeurent présentes néanmoins. Prenons un autre exemple, celui du vénérable maître Pilindavatsa[4]. Il lui prit l'envie une fois de traverser le Gange. C'est à ce moment précis que le fleuve déborda : le niveau de l'eau y était très haut. Or le Bouddha avait bien précisé qu'il ne fallait pas exhiber ses pouvoirs surnaturels pour pouvoir traverser le fleuve. Comme il tenait à traverser le Gange et n'avait pas d'autre moyen de le faire, Pilindavatsa utilisa son œil du ciel pour savoir quelle déité avait la charge du Gange. Il vit qu'il s'agissait d'une esclave qui avait travaillé pour lui durant cinq cents vies. Il lui dit alors : « Petite esclave, je veux traverser le Gange, veuillez diminuer le niveau de l'eau, que je puisse passer. » La déité du Gange vit qu'il s'agissait d'un grand arhat et, bien qu'elle en fût assez mécontente, elle accéda tout de même à sa requête. Mais la déité, pensant que Pilindavatsa était irrespectueux envers elle, alla se plaindre auprès du Bouddha Sakyamuni, et lui dit que Pilindavatsa l'avait insultée. Le Bouddha demanda à un messager de faire venir le vénérable maître Pilindavatsa. Il l'interrogea alors : « L'as-tu traitée de petite esclave ? » Pilindavatsa confirma, et le Bouddha lui demanda de présenter ses excuses à la déité du Gange. Le vénérable maître accepta, puis, s'adressant à la déité : « Esclave, viens que je te présente mes excuses. » Quand il s'adressait à elle, il la traitait encore comme une esclave. À ce moment-là, le Bouddha donna à la déité cette explication : « Quand il a souhaité traverser le fleuve, il ne vous a pas insultée en vérité. Simplement, durant cinq cents réincarnations passées, vous avez toujours demeuré chez lui en qualité de petite esclave. Il avait pris l'habitude de vous traiter ainsi. C'est pourquoi il est sorti de sa bouche l'expression « petite esclave ». Ce n'est rien de plus qu'une habitude. En réalité, ce n'est pas délibérément qu'il vous a insultée. Ce n'est pas facile de changer une habitude en peu de temps. Ne vous fâchez donc pas. » Cette histoire est très connue dans le bouddhisme, et illustre que Pilindavatsa possède encore un peu d'orgueil ; mais en vérité, il n'a pas fait exprès d'être ainsi orgueilleux. C'est que, tout simplement, son habitude a fait qu'il n'a pas parfaitement nettoyé son orgueil. Il s'agit vraiment d'une habitude. Un grand arhat vit encore avec des graines contaminées. Imaginez alors ce qu'il en est chez les débutants bouddhistes !

C'est parce que la septième vijñāna a manifesté ces graines karmiques contaminées durant une très longue période, qu'elle est liée désormais à toutes les lois du dharma. Quand vous dormez d'un sommeil sans rêve, la conscience mentale est inactive. Mais la septième vijñāna, elle, ne cesse d'être active, et elle est toujours liée aux cinq sens et à leurs manifestations. C'est ce qui explique qu'elle soit en lien avec tous les dharmas. Quand il y a, au cours du sommeil, un grand bouleversement au niveau des manifestations sensorielles, la septième vijñāna va demander à la conscience mentale d'analyser la situation et de prendre une décision. Quand vous dormez sans rêver, que vous vous évanouissez, que vous êtes à l'agonie ou que vous êtes en état de samādhi sans pensée ou de samādhi de cessation ; lorsque vous êtes l'un de ces états, la septième vijñāna ne rompt pas ses liens avec les dharmas. Songez bien que la septième vijñāna, surtout quand vous êtes réveillés, est activée également. La septième vijñāna possède d'autres caractéristiques : elle doit prendre sans cesse des décisions et toutes choses en considération. Ces deux caractéristiques ne cessent jamais d'exister : la septième vijñāna est active à chaque instant. Celle d'un grand arhat, durant le laps de temps où la conscience mentale n'a rien analysé encore, est elle-même déjà mobilisée à cause des habitudes qu'elle a contractées dans le passé. C'est pourquoi le maître Nanda va d'abord regarder les femmes, par la force des vieilles habitudes. Cependant sa conscience mentale est consciente de ce phénomène, et va corriger sa septième vijñāna. C'est ce que nous devons toujours faire pour nettoyer toutes les saletés qui encrassent la septième vijñāna. Peu à peu ces graines karmiques seront ainsi transformées en graines propres : c'est de cette manière qu'on élimine nos mauvaises habitudes. Quand une habitude n'est pas parfaitement épurée, il reste donc encore un peu de contamination ; en arrivant au niveau du Bouddha, toutes les mauvaises habitudes ont été transformées et éliminées. C'est pourquoi la septième vijñāna, avant d'arriver au niveau du Bouddha, manifeste plus ou moins de graines karmiques contaminées. Pour les transformer en graines karmiques propres, il faut, après avoir atteint l'illumination, pratiquer très longtemps et travailler à transformer peu à peu les mauvaises habitudes en confrontant manas aux situations où elles se manifestent. Ne songez jamais que vous avez terminé et que vous n'avez plus à pratiquer. On dit souvent qu'on peut transformer les rivières, déplacer les montagnes aisément, mais qu'il est difficile de transformer une personne. Ce proverbe n'est pas juste. Si l'on prend une décision et qu'on entend la suivre résolument, on peut toujours, avec le temps, y réussir.

----

Question : Lorsque la nuit je rêve, et que je me réveille au petit matin, pourquoi m'arrive-t-il parfois de me souvenir de ce dont j'ai rêvé, et parfois non ?

Réponse : Si vous n'arrivez pas à vous rappeler votre rêve, c'est que votre conscience mentale a jugé que ce rêve n'avait pas beaucoup d'importance, qu'il ne lui était pas utile de le mémoriser. C'est pourquoi vous en avez un souvenir vague. Parfois en revanche, il vous revient très clairement, du fait que votre conscience mentale a considéré que ce rêve était important, qu'il lui fallait absolument le garder en mémoire. C'est un phénomène comparable à la sauvegarde d'un fichier sur un ordinateur : si vous jugez qu'il ne faut pas le perdre, votre ordinateur va le sauvegarder. De même, dès votre réveil, vous vous souvenez très bien de votre songe, parce que la conscience mentale a estimé qu'il fallait le mémoriser. La septième vijñāna en a compris également l'importance, et a donné elle-même son accord pour garder le rêve en mémoire : elle a décidé de le retenir. Ainsi, lorsque vous vous réveillez, vous vous en souvenez clairement.

----

Question : Comment peut-on savoir si le scénario d'un rêve correspond à une expérience faite dans une vie antérieure, s'il n'est que l'extension d'une habitude prise dans cette vie, s'il contient un sens particulier en lien avec la pratique bouddhiste chan[5], ou simplement s'il s'agit d'un rêve erratique et conçu uniquement par l'imagination ?

Réponse : Quand nous rêvons d'uriner, c'est que nous sommes presque réveillés : nous rêvons que nous désirons d'urgence aller uriner. Notre rêve est donc à ce moment très confus. C'est une illusion totalement incohérente et qui construit des confusions au niveau de l'identité des personnes présentes dans le rêve. C'est une sorte de mémoire bouleversée. Par contre, si tout est parfaitement ordonné, cohérent, que le processus d'apparition du rêve est très clair, c'est, souvent, que ce rêve est en relation avec des personnes que nous connaissons, dont le caractère et la personnalité, dans le rêve, sont eux-mêmes très cohérents. Mais s'il s'avère, en plus, que ces événements, également très ordonnés, ne sont jamais arrivés dans cette vie, c'est tout simplement que nous avons rêvé d'évènements s'étant tenus dans une vie passée. Ce sont quelquefois des prolongements du vécu, c'est-à-dire qu'il s'agit de certaines choses que nous n'avons jamais vécues dans cette vie, mais uniquement dans une vie passée.

Dans cette vie, c'est à travers votre rêve que vont apparaître de manière répétée, ces choses que vous avez étudiées jadis. Supposons par exemple que vous ayez éprouvé des difficultés durant ces dernières années, ou vécu une expérience très importante ou très agréable. Si l'un de ces événements vous apparaît en rêve, c'est un simple phénomène d'extension.

Parfois durant votre rêve, vous vous êtes vu en train d'étudier un sutra, et vous en compreniez le sens littéral. À votre réveil, vous réalisez que vous n'aviez jamais étudié ce sutra dans cette vie présente, que vous n'en aviez même jamais connu le nom. Vous consultez ensuite d'autres personnes, qui vous apprennent que ce sutra existe effectivement. Cela signifie que vous aviez déjà, dans votre vie passée, travaillé ce sutra. Ce rêve révèle donc des événements que vous avez vécus dans votre vie passée. Un frère de notre association, pour avoir pratiqué intensément le bouddhisme chan durant trois jours, est parvenu à voir la nature de Bouddha[6]. Il fit un jour ce rêve : il étudiait le sutra Vimalakirti Nirdesa. Quand il se réveilla il eut une sensation étrange, car il n'avait jamais étudié ce sutra dans cette vie. Il alla consulter certaines personnes, qui lui confirmèrent l'existence de ce sutra. Il récupéra ce sutra et vit que son contenu était identique à celui qu'il avait vu en rêve. Il a, dans cette vie-ci, pratiqué en récitant le nom d'Amitābha Bouddha ; il n'a jamais étudié aucun des sutras qui expliquent le vrai sens de tathagatagarbha. C'est parce qu'il a étudié ce sutra dans une vie antérieure, que celui-ci lui est apparu en rêve. C'est parce qu'il pouvait voir la nature du Bouddha, que ce souvenir lui est apparu.

--

Il vous vient quelquefois des rêves prémonitoires, qui vous prédisent des choses ou qui vous montrent des signes vous permettant de comprendre qu'il vous arrivera bientôt de bonnes ou de mauvaises choses, et ce, dans le but que vous contourniez les mauvaises et que vous vous orientiez vers les bonnes. D'après certaines croyances locales chinoises, certaines gens rêvent de seigneurs de la terre. Ces seigneurs leur racontent des choses qui vont arriver, et qui se réalisent effectivement. Quelquefois encore ce sont des « signaux » du bouddhisme zen. Ces signaux sont là pour vous aider à atteindre l'illumination. Il y a fréquemment des gens qui viennent pratiquer notre enseignement. Dans les rêves de certains d'entre eux, un vieux moine apparaît souvent et leur montre quelques-uns de ces signaux. À ce moment-là, les gens n'en saisissent pas toujours la signification, mais après qu'ils ont été illuminés, ils comprennent le vieux moine. Ce vieux moine est un saint illuminé. Souvent alors dans leurs rêves, ils ne savent pas comment le remercier.

Dans le monde des esprits malveillants, il existe aussi parfois des esprits illuminés. Ils sont peu nombreux, mais on ne peut pas dire qu'il s'y en trouve pas, car les bodhisattvas peuvent souhaiter naître dans chacun des six différents chemins. Souvent encore ils ne montreront pas qu'ils sont illuminés. Il arrive que les esprits aient capté les signaux à travers un maître du bouddhisme zen, sans en saisir le sens. Prenons l'exemple d'une personne de notre association qui, étant petite, rêvait de l'esprit de sa maison. Cet esprit lui montrait toujours le même geste : avant d'être illuminée, elle jugeait cet esprit ennuyeux. Après qu'elle fut illuminée, elle comprit qu'il n'était pas ennuyeux du tout. L'esprit lui montrait le signal du bouddhisme zen. Il s'agissait d'un saint illuminé. Mais ce cas-là est rarissime. Souvent les bodhisattva veulent aider une personne à atteindre l'illumination. Ils deviennent délibérément l'esprit de la maison. Dans ce cas, c'est souvent le bodhisattva qui a permis à la personne d'être illuminée. Quelques temps plus tard, ces bodhisattva partent pour aller aider d'autres personnes. L'esprit de la maison a changé, alors même que la statue de la maison, elle, n'a pas changé.[7]

Un rêve fantaisiste exploite des habitudes acquises dans d'autres vies passées, et la septième vijñāna, avec sa qualité propre de parikalpitah-svabhava[8], s'attache sans cesse à toutes choses. C'est pourquoi la conscience mentale passe indéfiniment d'un objet à un autre. Cela n'a rien à voir avec la vie réelle, ni avec un signal du bouddhisme chan ou une prédiction. Cela n'a pas la moindre importance quant à la vie quotidienne. Ce phénomène est comparable à un écrivain qui rêve de trouver un dénouement à son roman : cela reste en dehors de la pratique, et n'a guère de sens.

----

Question : D'après ce que vous venez de décrire des différents rêves et de leurs contextes, quelle est la différence entre la sixième et la septième vijñāna ? En quoi diffèrent-elles de la huitième ?

Réponse : Dans le processus du rêve, la huitième vijñāna se moque bien de ce qui se passe, et elle ne prend en considération ni les bénéfices, ni ce qu'elle va perdre. Elle continue constamment de manifester les six objets des vijñāna internes[9] en tant qu'images mentales.

C'est semblable à un courant ininterrompu : la huitième vijñāna fournit sans cesse aux sixième et septième vijñāna des graines karmiques, afin que vous puissiez éprouver dans les rêves les sensations de douleur et de plaisir. Dans les rêves, la conscience mentale et la conscience qui prend les décisions sans arrêt les deux consciences s'attachent à la sensation de joie ou de souffrance. Cependant la huitième vijñāna y est indifférente. Alors qu'apparaissent les images objectales internes, elle continue de manifester celles externes[10], dans le but que la septième vijñāna continue d'avoir des contacts avec les images objectales externes qui proviennent de cinq objets des vijñāna. Cependant la conscience mentale n'est pas au courant de ce fait, elle pense qu'il n'existe pas d'images externes provenant des cinq objets des vijñāna[11]. Lorsque vous faites un rêve agréable et que, tout à coup, quelqu'un, à cause d'une affaire urgente, vous réveille, secoue violemment votre corps, la septième vijñāna va percevoir ces secousses à travers le sens du toucher, et va se dire qu'il y a des changements considérables par rapport à l'état antérieur, et qu'il faut les analyser afin de pouvoir comprendre de quoi il retourne. Mais puisqu'elle a une capacité d'analyse très limitée, elle va demander à la sixième vijñāna d'analyser cette image externe émanant du sens du toucher. À ce moment-là la conscience mentale analyse l'image externe émanant du sens du toucher. Lorsqu'elle a commencé son analyse de l'image externe du sens du toucher, vous vous réveillez, vous sortez de votre rêve.

C'est à travers cet exemple que je veux vous montrer le mécanisme qui fait interagir les sixième, septième et huitième vijñāna. Mais le fonctionnement réel de ce mécanisme n'est pas si facile à comprendre. Si vous avez réellement envie de le comprendre, il vous faut atteindre l'illumination, sans quoi vous ne pouvez que l'imaginer avec votre conscience mentale. Vous n'êtes pas capable d'expérimenter vraiment ce processus. Il faut, c'est impératif, l'illumination, pour comprendre le contenu de mon message. Cependant, concernant la huitième vijñāna, tathagatagarbha, il n'est pas possible de vous l'expliquer clairement. Si je vous en dis le secret, vous ne l'aurez pas découverte par vous-même, vous n'en tirerez donc aucun mérite, et vous peinerez à obtenir la sagesse.

Durant le rêve, la sixième vijñāna poursuit ses analyses : elle examine les images internes des six objets des vijñāna qui proviennent de la huitième vijñāna, selon ce qu'a commandé de la septième. Lorsque vous sortez de votre rêve, vous vous figurez que vous êtes allés ailleurs, mais en vérité vous êtes demeurés dans les images internes qu'a fait apparaître la huitième vijñāna. Vous n'avez jamais quitté l'environnement où vous a mis la huitième vijñāna. La conscience mentale effectue différentes analyses au sein de cette situation, et la septième vijñāna, associée à la conscience mentale, crée l'avidité, l'amour, la haine et la détestation dans cet espace même où sont les images mentales. La huitième vijñāna, au cours du rêve, ne se laisse pas emporter par ces différentes émotions ou par votre analyse : elle continue, indéfiniment, de vous montrer des graines karmiques d'images mentales internes, pour que les six images objectales continuent d'apparaître dans votre rêve. Elle continue aussi sans cesse de fournir les graines karmiques aux sixième et septième vijñāna, afin que que vous puissiez « jouer » dans le rêve, que vous y cultiviez des émotions variées ou que vous continuiez de pratiquer. Cependant, la huitième vijñāna, dans le rêve ou dans quelque autre état que vous soyez, n'éprouve aucune pensée ou émotion d'avidité ou de détestation. Voici les différences, dans les rêves, entre les sixième, septième et huitième vijñāna.

----

Question : que signifie « dormir sans se reposer » ? Quelle est la différence entre le fait de dormir sans se reposer et le sommeil « ordinaire » ? Comment peut-on atteindre cet état de sommeil sans repos ?

Réponse : Avant de répondre à cette question, je souhaiterais définir le concept de sommeil et de sommeil sans repos. Dormir, c'est laisser le corps au point qu'il ne produise plus de gestes physiques volontaires. C'est cela, dormir. Lorsqu'on dort, la conscience mentale n'est plus active, et quoi qu'il se passe à l'extérieur, on en est inconscient, on l'ignore tout à fait. C'est cela, se reposer. Vous ne devez pas rechercher cet état de sommeil sans repos. Certaines personnes, à cause de la débilité de leur mental, se trouvent dans un état de sommeil sans repos, et, de fait, n'arrivent pas à dormir. Cela ne signifie pas qu'elles ne le veulent pas : ce n'est là qu'un des symptômes de l'insomnie.

Dormir sans se reposer peut avoir, à la longue, de conséquences nuisibles. Cela peut augmenter les éléments de feu. L'haleine des personnes qui dorment bien sent bon les fleurs. Les personnes qui dorment mal ont une haleine fétide. Pour éviter cet inconvénient, il leur faut prendre du thé toute la journée. Il suffit que vous n'en preniez pas durant une demi-heure, pour que votre mauvaise haleine réapparaisse. Il est donc inutile de rechercher cet état de sommeil sans repos. Peut-être y a-t-il des gens qui se disent : « prends donc du thé, ce n'est rien et ce n'est pas cher. » Mais, si vous ne connaissez pas l'art de prendre du thé, cela peut avoir encore des conséquences nuisibles qui refroidiront votre métabolisme. Je suis très sérieux : ce problème de santé apparaîtra au bout d'un certain temps.

Il existe deux types de sommeil sans repos : on vient de citer le premier de ces types, qui concerne les personnes sujettes à la nervosité, laquelle génère des insomnies. S'il y a eu de graves changements dans la vie de quelqu'un, cette personne montre des signes d'impatience et d'inquiétude qui l'empêchent de dormir et de se reposer. Dans le second cas, ce phénomène est lié à la pratique de la concentration profonde, qui prive le pratiquant de sommeil. Par exemple, il m'est personnellement très difficile de m'endormir quand la nuit vient. Il n'y a qu'une méthode qui me permette de m'endormir, une méthode semblable au fait de vouloir quitter ma vie pour entrer dans le nirvana sans reste : j'enlève « moi-même », ma conscience mentale ». Si je ne le fais pas, si je n'« enlève » pas ce moi qui est conscient de n'avoir pas de pensée, je ne parviens pas à m'endormir. Lorsque quelqu'un demeure toute la journée dans un état sans pensée, cet état qui vient de la concentration l'empêche de dormir. Plus votre esprit est lucide, plus il vous est difficile de vous endormir, et moins vous parvenez à dormir, plus augmente le temps au cours duquel vous êtes en possession de votre conscience mentale sans pensée. Votre concentration est alors de plus en plus intense, et vous empêche davantage encore de vous endormir. Cela forme un cercle. Si je veux pratiquer la méditation, c'est très simple : il me suffit de m'asseoir pour entrer très vite en samādhi. Même lorsque mon corps est épuisé, si je veux m'asseoir pour chercher le sommeil, ce n'est vraiment pas évident. J'ai besoin de fournir beaucoup d'efforts avant de pouvoir m'endormir.

Il est arrivé une fois qu'une sœur de notre association, ayant entendu ma conversation, vienne me dire : « Maître, si vous êtes obligés de faire ainsi pour vous endormir, cela est très dangereux. Si jamais vous entrez dans le nirvana sans reste, qu'allons-nous faire, nous, de notre association ? Nous n'avons pas fini d'apprendre. » Je lui ai répondu répondu que cela n'arriverait pas, car j'avais fait un vœu, celui de ne jamais entrer dans le nirvana sans reste. Après que ma vie sera terminée, mon bardo ira tout d'abord sur la terre d'Amitabha Bouddha, où j'étudierai plus profondément la sagesse des graines. Je me rendrai ensuite en Chine continentale pour continuer de propager l'enseignement relatif au vrai tathagatagarbha. Je n'entrerai jamais en nirvana sans reste, d'autant plus qu'il me reste beaucoup de temps à vivre. Il m'est impossible donc de rentrer en nirvana sans reste immédiatement.

Les deux types de sommeil sans repos viennent de ce que ces personnes n'arrivent pas à éliminer la conscience mentale. La conscience mentale ne peut pas disparaître, c'est pourquoi on parle d'un état de sommeil sans repos. Mais dormir sans se reposer n'est pas une bonne chose. Si vous répétez trop souvent cet état, votre corps ne le supportera pas, il sera de plus en plus faible. Je dors très peu à cause de l'état de samādhi où je suis, mais ces dix dernières années j'ai senti que mon corps avait mal supporté cet état de fait. Désormais je fais un effort pour pouvoir dormir comme tout un chacun.

Quand on parle de méditer toute la nuit sans dormir, on fait référence à deux types de situations. Le premier de ces types concerne certaines personnes qui prétendent seulement méditer au cours de la nuit, mais qui, dans les faits, ne font que dormir en position assise. Elles ne sont pas en samādhi. Il est déconseillé de dormir assis : il vaut mieux vous allonger, car il est plus efficace d'éliminer la fatigue dans cette position. Si quelqu'un en revanche ne parvient pas à dormir en position allongée, il lui est préférable alors de s'asseoir. Le second type de situations concerne les personnes qui pratiquent la méditation, qui entrent vraiment en samādhi. Ces personnes, étant toujours en relation avec les autres durant la journée, n'ont pas le temps de pratiquer la méditation. Pour autant elles ne l’ont pas abandonnée : elles profitent de la nuit pour s'y exercer. Ces personnes ont déjà le niveau requis de méditation : lorsqu'elles s'assèyent sur un coussin de méditation, elles parviennent immédiatement au premier niveau de dhyana. Puis elles entrent successivement dans le deuxième niveau, puis dans le troisième, et ainsi de suite. Bien qu'elles méditent durant la nuit et qu'elles aient un niveau très avancé de méditation, la fatigue qu'elles accumulent pendant la journée ne peut pas être éliminée grâce à ces différents états de méditation. La cause en est que, au sein des différents niveaux de de dhyana, la conscience mentale n'a pas disparu. La conscience mentale, au-delà du deuxième niveau de dhyana sama patti, persiste. Simplement, elle n'est plus en relation avec les cinq objets des vijñāna. Mais elle existe toujours, puisqu'elle est consciente de l'état de méditation où se trouve le pratiquant. La conscience mentale du pratiquant est donc toujours active. En conséquence, le système nerveux ne peut pas se reposer. Le corps du moine qui, ayant médité longtemps la nuit durant, sort de son état de dhyana au moment où les autres frappent les tablettes[12], est toujours fatigué, bien que son esprit soit serein et de bonne humeur.

La personne qui accède au quatrième niveau de dhyana peut rester sans dormir pendant des années, elle peut rester en état de méditation jour et nuit, et même passer la nuit entière en état de samādhi. Mais, si elle pratique ainsi durant une dizaine d'années d'affilée, son corps ne va pas résister. C'est la raison pour laquelle elle doit dormir quelquefois. À quoi est dû ce phénomène ? Au fait que, dans le quatrième niveau de dhyana la respiration et le pouls ont cessé, et les pensées également : tout y est très clair. Le fait de n'avoir plus ni respiration ni pouls signifie que, dans l'état de dhyana, vous ne pouvez éliminer la fatigue de votre corps, car les mécanismes de la respiration et de la circulation sanguine ont cessé, en sorte que les énergies dépensées par votre foie dans cet état de dhyana, ne peuvent pas être récupérées. Quand vous sortez de votre méditation, votre corps peut éprouver encore de la fatigue. Il faut donc parfois faire en sorte de bien dormir. Si vous pratiquez pour vous-même, que vous ne dépensiez pas d'énergie pour d'autres personnes, au moment d'atteindre le quatrième niveau de dhyana, vous n'avez plus besoin de dormir et vous n'avez plus besoin de rêver. Vous pouvez donc chaque jour vous dispenser de dormir.

Pour la personne qui entre en état de samādhi sans pensée ou de samādhi de cessation, la nuit, en entrant ainsi en méditation, sa respiration et son pouls cessent. Mais c'est là un phénomène différent de ce qui se passe quand une personne accède au quatrième niveau de dhyana. Durant sa méditation, la conscience mentale de cette personne est temporairement désactivée. Privée de sa conscience mentale, la personne est dans un état comparable au fait de dormir sans rêver. Il existe cependant encore d'autres différences, que je n'expliquerai pas aujourd'hui. Si une personne ne dort pas de toute la nuit et entre toutes les nuits en état de samādhi sans pensée ou de samādhi de cessation ; qu'elle cherche la tranquillité dans ce samādhi et que, au cours de la journée, elle soit très occupée, alors, lorsqu'au matin elle sort de sa méditation, elle ressent la fatigue de son corps qu'elle n'a pas pu éliminer. Bien qu'elle soit de bonne humeur et l'esprit tranquille, le corps demeure toujours aussi fatigué.

Pour pouvoir obtenir les fruits de la pratique de la libération, la méditation sans dormir n'est pas idoine. C'est par le détachement des soucis qu'on obtient ces fruits. Pour obtenir les fruits sur le chemin de la sagesse, il faut trouver effectivement la huitième vijñāna, tathagatagarbha. Ce n'est pas non plus à travers la méditation sans dormir que vous y parviendrez. Par conséquent, le fait de dormir sans se reposer n'est pas primordial, sauf lorsque vous savez qu'il vous reste peu de temps à vivre et qu'avant de décéder, vous souhaitez atteindre le samādhi de cessation. Dans ce seul cas, vous avez besoin de pratiquer la méditation sans dormir de la nuit, afin de pouvoir atteindre le niveau de samādhi de cessation. Sinon, c'est inutile. Pour ceux qui pratiquent depuis longtemps (une dizaine d'années au moins), s'ils possèdent un corps physique et qu'ils dépensent des énergies quotidiennement pour autrui, dans ce cas il leur faut dormir, car c'est une façon de garantir le bon fonctionnement du corps. D'une manière générale, on peut dire que la pratique de la méditation sans sommeil n'est pas très importante.

----

Question : Au cours de mon sommeil, je peux observer ma propre pensée, être concentré et réfléchir sur le dharma sans avoir à observer les cinq objets des vijñāna externes. Je peux demeurer dans un état de clairvoyance et même savoir si une pensée irrationnelle apparaît, puis, immédiatement, revenir à cet état de clairvoyance pour y demeurer jusqu'à l'aube. Cependant, le corps, au matin, ne sent pas la fatigue quand je m'en vais travailler. Quelle différence cet état de fait présente-t-il avec celui de quelqu'un qui a eu, durant son sommeil, beaucoup de pensées irrationnelles, et dont le corps au réveil est très fatigué ?

Réponse : Ceci n'est qu'un état temporaire. Cet état, je l'ai vécu et y suis resté pendant deux ans et demi après avoir été illuminé. Je n'ai pratiquement pas dormi durant cette période. Je restais dans cet état de sommeil sans repos. On peut parler ici d'état de clairvoyance. Quand vous dormez sans vous reposer, votre corps est très certainement en activité. Cela veut dire qu'il continue de fournir des efforts. Lorsque vous observez ce phénomène, il vous vient le désir de reposer la partie du corps qui fait ces efforts, vous désirez demeurer tranquille. Mais après quelques temps, vous réalisez que votre corps, ici ou là, est de nouveau tendu. Cela est dû à la septième vijñāna. Vous tentez donc une fois encore de reposer votre corps. Il se peut très bien que vous ayez à poursuivre ce genre d'exercices jusqu'au petit matin. Mais ce n'est qu'une étape, un passage. Je ne conseille pas aux gens de le rechercher, mais je ne veux pas non plus m'y opposer, car c'est une étape nécessaire pour ceux qui cherchent à être illuminés et pour ceux notamment qui désirent voir la nature de bouddha. Il ne faut pas chercher cet état pour lui-même. Mais pour nous, c'est ce qu'on appelle un état de clairvoyance. Cet état est obtenu à travers la joie de l'illumination, laquelle est un état très naturel pour les gens qui ont réussi à voir la nature de Bouddha. Il ne faut pas chercher à y demeurer, c'est un simple phénomène qu'on rencontre au cours de la pratique. Par contre, si vous voulez l'utiliser pour votre méditation, elle offre un grand bénéfice : généralement, lorsqu'on éprouve cette joie de l'illumination, on ne sent aucune fatigue. Cela est dû au fait que la joie de l'illumination procure des sensations très agréables aux gens. L'insomnie en revanche fatigue l'esprit, car dans ce cas, lorsque les personnes dorment, leur esprit est très agité, il n'est pas tranquille, si bien que pendant le sommeil ils ne récupèrent absolument pas la fatigue physique accumulée durant la journée, et qu'ils dépensent encore plus d'énergies. C'est pourquoi ces personnes, au réveil, se sentent très fatiguées.

Le corps dans le royaume du désir a besoin d'interrompre le gaspillage d'énergies grâce au sommeil. Pendant que l'on dort, on peut, à travers la circulation du sang et la respiration, régénérer les cellules dépensées dans la journée. C'est ainsi qu'on élimine la fatigue et qu'on récupère les énergies dans le foie, afin qu'on puisse avoir le lendemain de bonnes énergies et pouvoir exercer et pratiquer. Ceci est un phénomène habituel dans le royaume du désir. Alors qu'on pratique et qu'on est illuminé, on ressent, présente en nous, la joie de l'illumination ; toutefois ce n'est pas ce qu'on cherche : ce que l'on cherche, c'est à rompre l'ignorance causée par chaque pensée, qui regroupe les quatre types de troubles résidents. On élimine cette ignorance pour obtenir les fruits du chemin de la libération. Cela signifie qu'on élimine peu à peu les fausses connaissances à mesure que l'on progresse sur le chemin de la sagesse. C'est à cela qu'on doit consacrer toute son énergie dans la pratique.

Durant le sommeil il est très bon de concentrer la pensée sur l'enseignement du Bouddha. Les pratiquants tantriques ont une méthode de yoga du sommeil conscient. Cette pratique est basée sur les principes éternalistes, elle est donc différente de la nôtre. Ils ont aussi d'autres façons de pratiquer, comme de dormir sans dormir. Allongés sur un lit, ils essaient d'ignorer les cinq objets des vijñāna externes (ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas de contact avec ces cinq vijñāna racines). Ils se refusent à les percevoir. Ils essaient de rester tranquilles sans avoir aucune pensée délirante. Bien entendu, il est bon de pratiquer ainsi, mais cela ne permet pas d'atteindre le niveau de bouddha, comme ils l'ont affirmé, parce que cette étape appartient encore au domaine de la conscience, donc dépend de la conscience mentale. Mais pour aider à pratiquer la méditation et accéder aux différents niveaux de dhyana, c'est tout de même une bonne méthode. Cependant, si vous voulez pratiquer la méditation pour obtenir tel dhyana, la méditation en position assise semble malgré tout la plus adéquate, car la plus efficace.

Avant de m'endormir, je vais pratiquer cette méthode, je vais m'y exercer : elle est quand même d'une certaine efficacité. Je peux apprendre beaucoup de choses au sujet de mes vies passées grâce à cette méthode. Je m'y étais exercé durant un certain temps, jusqu'à ce que je parvienne à la pratiquer avec succès. Il m'est donc tout à fait possible de basculer d'une époque et d'un espace à d'autres époques et d'autres espaces. Néanmoins, je ne peux pas voir ''sur commande'' ce que je voudrais voir. Mais je suis parvenu malgré tout à découvrir beaucoup de choses sur mes vies passées. Puisque je n'arrive pas à trouver facilement le sommeil, j'utilise souvent, pour m'endormir, cette méthode qui me permet de consulter mes vies antérieures, de savoir quelles expériences j'y ai vécues. Très fréquemment des images m'apparaissent, qui proviennent de la ville de ChangZhou. J'ignore si, aujourd'hui, à ChangZhou, l'entrée principale est toujours la même que celle dont j'ai reçu les images. Il y a neuf cents ans se trouvait un rempart contigu à l'entrée principale de ChangZhou, laquelle donnait sur une rue. Des deux cotés de cette rue étaient situés les magasins. La façade de ces magasins était surplombée d'une banne faite de tissus très épais. Souvent lorsque je revois ces images, je me trouve debout sous une banne, à regarder l'entrée principale de ChangZhou. Toutes ces observations m'aident plus ou moins à obtenir certaines informations sur telle vie passée, mais ne me permettent pas vraiment de progresser dans la pratique bouddhiste. En revanche, pour ce qui est de pouvoir observer sa vie comme s'il s'agissait d'un rêve, cette pratique n'est pas mauvaise. Lorsque vous découvrez ce que vous avez fait dans votre vie antérieure, tout le karma que vous avez produit vie après vie, y compris tous les bons karmas que vous avez obtenus, puis que vous considérez ce que vous faites présentement, vous voyez que votre vie antérieure s'apparente à un rêve. Sur le chemin de bodhisattva, la pratique consistant à observer la vie comme un rêve, peut être utilisée en vue de réussir plus rapidement. Pourtant ce n'est pas par cette pratique que j'ai réussi moi-même. Je suis parvenu à voir la vie comme un rêve en même temps que je suis parvenu à l'illumination et que j'ai vu la nature de bouddha. Ces faits sont décrits dans mon rapport sur l'illumination.

----

Question : Lorsque je dors, je m'implique souvent dans mon rêve. J'en éprouve de la honte, bien que je sache très bien que les rêves sont une illusion. Malgré cela, je perds totalement le contrôle de mes rêves. J'avais juré par la suite de ne plus me faire contrôler par eux. Un peu plus tard, j'ai fait certaines expériences dans des rêves, où il m'était possible d'être un observateur qui ne se fait pas influencer par le contenu du rêve. Ce que j'ai fait est-il correct ?

Réponse : C'est juste. Par exemple, les maîtres tantriques pratiquant le yoga du sommeil disent aussi que la vie est semblable à un rêve. Cependant ils sont incapables d'observer la vie comme telle. Quand ils disent observer la pensée, ils observent en réalité la conscience mentale. La conscience mentale se lie étroitement aux six objets des vijñāna dès qu'elle entre en contact avec l'un d'eux au moins. En effet, il est impossible, par cette voie, d'observer la vie comme un rêve. Pour y parvenir, il faut prendre conscience que la huitième vijñāna est le tathagatagarbha. Alors seulement il est possible de voir que la vie est un rêve. C'est pourquoi leur pratique n'est pas juste. Si vous pouvez vous rappeler de vous-même, de quoi devez-vous vous rappeler ? De ceci : quand je suis réveillé, je suis encore dans un rêve. La vie est un rêve. C'est au moment de la mort que l'on est réveillé. La méthode consistant à se rappeler très souvent dans les rêves que l'on est en train de rêver, peut produire cet effet-là, que tout est souvent un rêve. C'est ainsi que vous pouvez aisément vous réveiller de votre rêve, ou bien encore, être un observateur dans votre rêve. Ceci est une pratique destinée aux gens ordinaires.

Concernant la pratique durant le rêve, il en existe une autre : c'est celle que l'on acquiert lorsque l'on a atteint le deuxième niveau de bodhisattva, et où l'on peut observer ce monde comme n'étant plus qu'ombre et lumière[13]. Le pratiquant peut passer d'un rêve à l'autre. Pour réussir dans cette pratique, il faut un très haut niveau de sagesse. Mais cela n'a pas vraiment de relation avec la pratique de la méditation. Par contre, pour pouvoir basculer sans mal du contexte d'un rêve à un autre contexte, pour pouvoir expérimenter vraiment les choses de cette façon, il vous faut quand même la pratique de méditation. En réalité, quand vous avez obtenu la sagesse qui vous autorise à voir le monde en tant qu'ombre et lumière, vous découvrez une chose : que cela n'a pas vraiment de relation directe avec la sagesse et la méditation. C'est comme lorsque vous voulez être illuminé : il vous faut pratiquer, au sein de notre association, la méthode Kan-Hua-To[14]. Lorsque vous parvenez à l'illumination, vous découvrez que l'illumination et la méthode Kan-Hua-To sont deux choses distinctes. Cependant, si vous ne faites pas attention à votre pensée et que vous n'ayez pas le niveau requis de Kan-Hua-To, vous ne pouvez trouver la huitième vijñāna, tathagatagarbha. On ne peut donc pas tout à fait dire qu'il n'y a pas de relation. De la même façon, pour obtenir le niveau qui vous permet de voir le monde comme étant ombre et lumière, vous avez besoin d'analyser vos doutes. Lorsque vous avez un doute à ce sujet, analysez-le : qu'est-ce que c'est ? Je ne peux pas moi-même vous l'expliquer clairement. Une fois que vous avez achevé votre analyse, vous devez bien structurer votre pensée. Si vous avez assez de sagesse, cette structuration prendra deux ou trois mois. Après quoi, vous découvrirez que vous pouvez changer à votre guise les images mentales de vos rêves. Ce niveau où vous voyez le monde en tant qu'ombre et lumière, est encore différent de ce qu'on vient d'expliquer concernant les rêves. Pour arriver à ce niveau, il faut beaucoup de mérites, il faut avoir fait preuve de générosité envers les êtres sensibles, et avoir progressé beaucoup en méditation et en sagesse. Quand ces conditions ont été remplies, il est possible d'arriver au but. Je vous donne ici brièvement quelques indications sur lesquelles vous pourrez travailler plus tard.

----

Question : Comment se forment les pensées incohérentes[15] ? Pendant la méditation, il ne me vient pas d'idées associées au langage. Cependant je vois le mental qui continue de fonctionner comme un robinet qui ne cesserait de couler. Je suis conscient qu'il y a de nombreuses graines karmiques qui apparaissent et disparaissent. Pendant la méditation, de temps à autre, après avoir longtemps médité, une idée commence à se former qui va générer des pensées incohérentes. Les caractéristiques de la septième vijñāna, à savoir l'attachement et la capacité de faire apparaître des graines karmiques lourdes[16] émanant de la huitième vijñāna, sont-elles à l'origine de ces pensées incohérentes ?

Réponse : Oui, vous avez raison, en réalité c'est exactement cela. Comment les pensées incohérentes se forment-elles ? Tout le monde aimerait le savoir. Beaucoup de gens voudraient être capables de n'avoir pas de pensées et atteindre l'état de samādhi, mais n'y parviennent pas. Ils se figurent que, pendant la pratique, il ne faut pas avoir de pensées incohérentes, mais en général ils se concentrent pour les contrôler. Pourtant, immédiatement après d'autres pensées renaissent sans même qu'ils s'en rendent compte. Il est presque impossible de ne pas faire resurgir la pensée. Bien des gens étudient le bouddhisme chan, mais en réalité les méthodes qui leur ont été enseignées ne sont pas le vrai chan. Ces méthodes vous aident simplement à accéder au niveau de samādhi[17]. Elles vous enseignent à vous concentrer sur votre respiration, ce qui est devenu la méthode la plus fréquente du bouddhisme « chan ». Dans le monastère de l'école de Jingtu Zong[18] on répète le nom de bouddha pour éviter les pensées incohérentes. Si vous avez de lourdes pensées de ce genre, vous citez le nom de bouddha à très forte voix, et quand elles sont légères, vous le nommez à vois basse. Mais, que vous vous concentriez sur votre respiration ou que vous récitiez le nom de bouddha, vous ne parvenez pas à rompre ces pensées. Il y a des gens qui peuvent être bien concentrés sur leur respiration pendant trente minutes ou une heure, mais les pensées incohérentes reviennent ensuite. Ils n'arrivent pas à les interrompre pour de bon. Un grand nombre de personnes, dans un monastère célèbre, pratiquaient la méthode de concentration sur la respiration. Elles ont pratiqué durant plus de dix années, et finalement, sont parvenues à n'avoir pas de pensées incohérentes ni de perturbations. Cela veut dire qu'elles ne savaient pas encore comment commencer à interrompre les troubles.

Je me souviens : j'arrivais au niveau de l'illumination, je savais qu'il fallait pratiquer la méditation. À l'époque, j'ignorais qu'il fallait étudier la sagesse des graines sur le chemin de bodhi. Je pratiquais les quatre dhyanas et les huit samādhis, et je ne savais pas qu'il fallait pratiquer l'anutpattika dharma ksanti[19]. Je le sais aujourd'hui. Dans le passé, pendant la pratique des quatre dhyanas et des huit samādhis, dès que je m'asseyais pour méditer, j'utilisais une méthode de la nostalgie de bouddha, mon seul but étant de n'avoir pas de pensées incohérentes. Mais je n'y parvenais pas, je ne faisais qu'éviter de les suivre et conserver la pensée relative à la nostalgie de bouddha. Je n'arrivais pas à ne pas faire apparaître ces pensées incohérentes. C'est pourquoi, lorsque je pratiquais la méditation, je pouvais bien ne pas suivre ces pensées, mais n'étais pas capable de les arrêter. Après, lorsque j'arrivais au premier niveau de dhyana, je voulais poursuivre pour atteindre le deuxième niveau : j'envisageais, pour méditer, de ne pas utiliser la méthode de la nostalgie de bouddha, mais la méthode « standard ». Cependant il m'était toujours très difficile d'accéder au deuxième niveau de dhyana. Pourquoi ? Dans le premier état de dhyana on se trouve au-delà du concept du langage. Au-delà de ce concept, il faut que soit présent quelque chose qui, plus tard, pourra s'exprimer par le langage ; cependant les choses sont tout à fait différentes au deuxième niveau de dhyana. À ce niveau-là, il suffit qu'apparaisse une seule pensée (même si elle n'est pas exprimée verbalement) pour que, aussitôt, vous ne soyez plus dans le deuxième niveau de dhyana. C'est un réel problème : il n'est même pas nécessaire qu'il y ait une pensée exprimée par le langage. Une pensée inexprimée suffit pour que vous soyez sorti du deuxième niveau de sama patti dhyana.

Ces pensées incohérentes, il ne vous est pas possible de les interrompre, même quand vous pratiquez la nostalgie de bouddha : vous pouvez arrêter des pensées liées au langage ; cependant vous êtes toujours exposé à la possibilité d’avoir des pensées non liées au langage. Ces pensées, on ne peut pas les arrêter. Au deuxième niveau de dhyana, si vous avez tout à coup une pensée qui n'est pas liée au langage, vous n'êtes déjà plus dans le deuxième niveau de sama patti dhyana. À l'époque, c'était vraiment difficile pour moi : je souffrais beaucoup. Je pratiquais d'abord dans un état de conscience grâce auquel je pouvais observer (ce qui correspond au premier niveau de dhyana), puis il fallait passer par une étape qui permettait d'atteindre un samādhi dans lequel la conscience n'existe plus, mais où l'on pouvait encore observer (ce qui correspond à un « pré-dhyana » qui permet d'entrer dans le deuxième niveau de dhyana). Il faut pratiquer pour pouvoir demeurer longtemps dans ce samādhi. Ensuite seulement on peut entrer dans cet état sans conscience et sans observation (c'est-à-dire le deuxième niveau de dhyana). Si vous ne faites pas l'effort de régler vos problèmes, quand vous êtes dans l'état où vous n'avez pas de conscience pendant longtemps, mais que vous pouvez continuer d'observer, vous pouvez entrer au deuxième niveau de dhyana, mais jamais très longtemps, car des pensées non liées au langage peuvent très facilement apparaître et vous faire quitter cet état. Vous êtes alors aussitôt sorti du deuxième niveau de sama patti dhyana. Vous ne pouvez même pas y demeurer tranquille. C'est vraiment très ennuyeux.

Par la suite, je me suis occupé davantage de diffuser l'enseignement du Bouddha, chose qui me préoccupe de plus en plus. Je n'avais plus le temps de pratiquer la méditation et d'entrer en samādhi, si bien que j'abandonnais le plaisir de méditer. Sans m'en rendre compte, plusieurs années sont passées ainsi. Mais un dicton chinois dit : « tu sais ce que tu perds le matin, mais tu ne sais pas ce que tu vas gagner le soir. » Ces deux dernières années, j'ai noté qu'il était très facile de n'avoir une pensée sans lien avec le langage. Au stade actuel, pour que je reste tranquille dans le deuxième niveau de dhyana, ce n'est plus un problème, il m'est inutile de faire des efforts, des sacrifices : je peux tout naturellement avoir des pensées liées au langage. J'ai analysé ce phénomène pour en connaître la cause : tous mes problèmes ont été réglés. Bien entendu je n'ai plus de pensées sans lien avec le langage.

Maintenant, si vous me demandez si quelque chose me tracasse encore, oui, une chose encore me tracasse : le vrai enseignement de bouddha a disparu de ce monde. Mis à part ça je n'ai aucun souci. Et comme je n'ai aucun autre souci, il ne me viendra évidemment pas de pensées incohérentes.

Dans les premiers temps où je me suis mis à propager l'enseignement du Bouddha, il m'arrivait souvent, pendant la méditation, de me demander si certaines personnes de notre association avaient déjà dépassé certains obstacles liés à la pratique, si elles avaient dépassé le « goulot de bouteille de la pratique ». À cette époque-là, pendant la méditation, j'avais beaucoup de pensées. À présent je ne pense plus du tout. Je sais clairement que tout ceci dépend du karma de chacun de nous. Je vous transmets l'enseignement, je vous donne également des tuyaux pour la pratique. Partant, que vous parveniez ou pas à l'illumination, que, après l'illumination, vous arriviez à avancer ou pas, cela dépend des bénédictions, de votre karma et de vos efforts. Cela ne dépend plus de moi, en conséquence, je ne m'en préoccupe plus. Si jamais je pense à vous et que je crée des pensées incohérentes, je ne pourrai pas vous aider à dépasser les obstacles. Mais si jamais j'ai pour vous des pensées incohérentes qui peuvent vous aider à atteindre l'illumination ou à dépasser les obstacles sur le chemin de la pratique, alors, là, je passerai beaucoup de temps pour avoir ce type de pensées. Mais en réalité, tous les efforts que je peux faire pour vous ne vous servent à rien. Pourquoi vais-je dépenser mon temps de pratique pour vous ? Même si je pense que vous avez déjà dépassé les obstacles, cela demeure une image de ma conscience mentale, et non la réalité. Cela ne vous donne pas la moindre petite aide. Pourquoi vais-je gaspiller mon temps ? Pourquoi ne vais-je pas plutôt faire d'effort pour pratiquer moi-même ? En faisant ainsi, je reste tranquille par rapport à mes affaires.

Avant l'année qui vient de s'écouler, mon plus jeune fils est parvenu à entrer à l'université, il a passé une audition avec succès sans avoir eu besoin de passer l'examen. Je n'avais pas besoin de l'accompagner pour qu'il passe son examen durant ces jours de canicule. Mon fils a un très bon fond, je n'ai pas besoin de me préoccuper de lui, ni d'ailleurs de mes dépenses quotidiennes relatives au troisième âge. Avec ce qui me reste d'argent, si je ne fais pas de dépenses inutiles, je dois pouvoir vivre tranquille jusqu'à la fin de mes jours, sans avoir à me préoccuper de rien. Ma seule préoccupation désormais, c'est de savoir comment propager le vrai dharma pour toujours, et comment le maintenir dans sa pureté originelle, durant tout le prochain siècle. Mis à part ça, je n'ai pas d'autre préoccupation.

Sans préoccupation, la méditation devient beaucoup plus facile : je n'ai plus besoin de lutter contre ces pensées incohérentes. Je peux donc entrer aisément dans le deuxième niveau de dhyana et y demeurer presque indéfiniment. Ce qui veut dire que les « attentions incohérentes » viennent de ce qu'on a encore des souillures liées au dharma du monde. Car si l'on est attaché au dharma d'un des trois mondes, cela revient à dire que l'on est attaché à soi-même, à sa famille. Du coup, de nombreuses pensées ou attentions incohérentes se produisent. Cela perturbe notre pratique de la méditation, ce qui signifie que les pensées et les attentions incohérentes émanent bel et bien des souillures. Quand vous n'en avez plus, les pensées et les attentions incohérentes diminuent peu à peu et finissent par disparaître. C'est ainsi qu'il faut comprendre le concept du chemin de libération : n'avoir plus de souillures afin d'obtenir les fruits de la libération. Ce n'est pas à cause de la méditation que vous réussisisez à vous libérer : si vous n'avez pas interrompu vos souillures, il vous viendra à tout moment des pensées et des attentions incohérentes. Cela peut vous venir très subitement. Dans le Mahayana, on parle d''ignorance causée par chaque pensée[20]. Cela signifie que les souillures ne sont pas interrompues, que les pensées et les attentions incohérentes peuvent apparaître.

Il est deux types de pensées incohérentes : les pensées dont on vient de parler sont liées au langage, à la parole : ce sont des pensées qui peuvent survenir durant la méditation. Cependant, dans le Lankavatara sutra, il est question d'une autre pensée incohérente. Cette pensée, qui correspond à un point de vue erroné et est liée à un raisonnement erratique, est une pensée qui ne correspond pas à la réalité. Cette pensée cependant, dans le Lankavatara sutra, n'est pas la cause de l'ignorance causée par chaque pensée. L'origine de ces pensées est notre ignorance concernant la réalité du monde, du monde du dharma. Pendant la méditation, il nous vient souvent une pensée qui possède un sens, une signification, avant qu'on associe cette signification au langage. Si vous n'êtes pas concentrés, ces pensées liées au langage vont produire des images. On dit alors qu'on est dans un état de « rêve éveillé ». De l'apparition de la pensée jusqu'à son expression dans le sommeil, sous une forme onirique, il existe différentes étapes.

Comment apparaît une pensée qui n'est pas liée au langage ? En vérité, cela provient de la nature de la septième vijñāna. Sa caractéristique, qui est parikalpitah-svabhava, fait qu'il s'attache sans cesse à toutes les circonstances, à tous les dharmas. C'est manas qui vit cet attachement constant. On ne va pas parler ici de cet attachement. On va plutôt parler de l'idée à laquelle tout le monde adhère : que nous sommes notre conscience mentale.

En réalité, nous n'avons pas une connaissance suffisante au sujet de la conscience mentale. Nous pensons que la conscience mentale est nous-mêmes. Cela explique pourquoi, dans le passé, les gens pensaient que celui qui peut avoir la connaissance, considère que cette conscience mentale est lui-même. Ils considéraient la septième vijñāna manas comme un mental qu'on ne peut connaître. D'autres personnes, dont le raisonnement est encore plus absurde, croient que cette septième vijñāna est le cerveau. Si cela était vrai, tous les parents devraient voir que leurs futurs enfants sont venus avec un grand cerveau au moment d'entrer dans le ventre de leurs mères. Pourtant il n'est pas un seul couple dont la femme a renfermé dans son ventre un enfant avec une grosse tête ! Manas est un mental, ce n'est pas un organe. Le Bouddha a dit : après que quelqu'un est décédé, manas va entrer dans le ventre de la maman avec, l'accompagnant, une certaine vijñāna de laquelle dépendent le nom et la forme. La manas en question, c'est ce qui prend sans cesse des décisions, et la conscience mentale a besoin de cette manas pour fonctionner. La plupart des gens ne comprenaient pas cela, et se figuraient que celui qui est conscient du moi est aussi celui qui peut avoir la connaissance, avoir conscience, c'est-à-dire la conscience mentale : ils ignoraient ce qu'est le vrai moi. Mais, de fait, manas, le mental qui prend sans cesse des décisions, est votre moi[21]. Il est regrettable que la plupart des gens n'aient pas compris cela. Même les pratiquants bouddhistes ne le comprenaient pas, et le « maître » Yin-Shun lui-même s'est trompé à ce sujet.

Ceux des pratiquants bouddhistes qui ne sont pas de notre association qui vont entendre cette explication, vont peut-être venir protester en affirmant les choses suivantes : « Vous avez dit que la vijñāna manas était le vrai moi des gens. Mais quand je dors et ne rêve pas, j'oublie l'existence de ce moi, j'ai complètement disparu. Si jamais ce moi-là existe vraiment, alors cette manas qui peut prendre sans cesse des décisions, pendant que je suis dans cet état sans rêve, devrait être consciente de sa propre existence ; pourtant elle disparaît dès lors que je suis endormi. » Si vous pensez comme eux, vous vous fourvoyez. Manas est différente de la conscience mentale : la conscience mentale est capable d'introspection, ce que ne peut pas faire manas. (Malgré tout, si on regarde les choses du point de vue de la sagesse des graines et de manière plus approfondie, on note que manas aussi a cette capacité ; mais ce n'est pas la sagesse d'un bodhisattva tout juste illuminé qui peut comprendre cela.)

En tout état de cause, c'est parce qu'elle n'a pas cette capacité d'introspection, que manas ne peut pas avoir conscience d'elle-même. Comme elle n'a pas cette conscience d'elle-même, quand vous dormez sans rêve, la capacité d'introspection de la conscience mentale disparaît elle-même. Sans la capacité d'introspection de la conscience mentale, vous ne pouvez pas avoir conscience de vous-même. Manas ne cesse pas d'exister quand les gens dorment. C'est juste qu'elle n'a pas cette capacité d'introspection, de s'observer elle-même : c'est pourquoi elle n'est pas consciente de sa propre existence. Après que le dormeur est réveillé, elle peut prendre conscience d'elle-même parce que la conscience mentale est réactivée. Elle ne sait pas que la conscience mentale, dans le rêve, peut être momentanément arrêtée, mais elle a toujours cette faculté de prendre des décisions. C'est pourquoi les gens, une fois réveillés, peuvent ressentir cette existence du moi : la conscience mentale a réapparu, car elle a sa propre capacité d'introspection pour se rendre compte qu'elle existe.

--

La caractéristique de manas, parikalpitah svabhava, existe depuis toujours, elle n'a jamais changé. Manas, qui est éternelle, possède aussi une autre caractéristique, qui consiste à tout examiner et prendre en considération. Cela veut dire que depuis des temps infinis, dans votre sommeil, ou quand vous êtes dans le coma, à l'agonie, dans un état de samādhi ou dans le samādhi de la cessation, manas est toujours présente, elle n'est pas anéantie, c'est pourquoi elle est éternelle. Depuis toujours, cette manas peut examiner tous les dharmas. Même pendant que vous dormez, que vous êtes dans le coma, que vous êtes à l'agonie, que vous êtes dans un samādhi ou dans le samādhi de cessation, elle continue d'observer les dharmas. C'est pourquoi on dit d'elle qu'elle est un observateur : elle peut identifier sans cesse la nature des différents dharmas. Quand vous êtes réveillés, manas, à travers les cinq objets des vijñāna, utilise la conscience mentale pour discriminer. Concernant chaque dharma, elle se pose la question suivante : faut-il continuer d'utiliser cette même manifestation karmique, ou en changer ? Cette question, pendant que vous êtes éveillés, ne cesse jamais d'être posée. Pendant le sommeil sans rêve et pendant les quatre autres états où vous avez perdu conscience, elle se manifeste également. Quand manas sent qu'il se passe quelque chose de particulier, elle réveille la conscience mentale : elle envoie un message à alayavijñāna, lui demandant de faire apparaître la conscience mentale. Quand la conscience mentale apparaît alors, manas va l'utiliser pour discriminer, après quoi la conscience mentale lui dira ce qu'elle doit faire. Pendant que vous êtes dans l'un des cinq états dont nous venons de parler, manas se manifeste de façon continue. Si jamais manas ne se présentait pas dans ces cinq états, vous ne pourriez pas, une fois endormis, vous réveiller. En conséquence, on peut raisonner de la manière suivante : cependant que votre conscience mentale, dans l'un des cinq états susmentionnés, est inactive, manas quant à elle continue toujours d'exister et de fonctionner. Tous les objets, quels qu'ils soient, ont besoin d'être analysés à travers la conscience mentale, puis de passer par manas pour faire un choix. Une fois que ce choix est fait, manas passe autre chose. Cependant les gens ne voient pas ce mécanisme, et ils pensent souvent que la conscience mentale, bien qu'elle ait cessé de fonctionner durant la nuit, est le vrai moi.

La nature de manas, qui présente les trois caractéristiques que nous avons évoquées, à savoir qu'elle examine tous les dharmas, qu'elle prend en compte tous les résultats de ce qu'elle a examiné avant de prendre une décision, et qu'elle est éternelle, est toujours active, à n'importe quel moment, y compris dans les cinq états dépourvus de conscience mentale : elle déteste l'inaction. C'est pour cette raison que, lorsque la conscience mentale médite, pratique la nostalgie de Bouddha[22] et souhaite avoir en continu une pensée tranquille, ou encore lorsque vous avez envie d'atteindre le niveau de dhyana et demeurer dans sa sérénité, il peut très bien vous venir soudain une pensée inattendue et incohérente qui n'est pas liée au langage. Si vous n'avez pas perçu cette pensée, vous allez vous y attacher, et elle va vous ramener dans cet état où la pensée est rattachée au langage. C'est à cause de cela que, même si vous méditez beaucoup, les bénéfices que vous retirez sont faibles. C'est ce qui explique pourquoi la pratique de la méditation devient difficile : il y a de nombreuses pensées incohérentes qui se présentent à cause de manas, qui aime s'attacher à toutes choses et qui n'a jamais envie de demeurer inerte. Votre conscience mentale avait envie de pratiquer la méditation pour obtenir les fruits de la libération, mais manas, elle, n'a pas eu pour autant le désir de se taire durant votre méditation. C'est pourquoi, lorsque vous commencez votre méditation, manas va exploiter vos anciennes habitudes pour continuer de fabriquer des pensées incohérentes et les transmettre à la conscience mentale. Cela rend alors votre méditation très difficile en termes de résultats. Si vous voulez obtenir des résultats, il vous faut vous détacher des différents désirs de ce monde, notamment ceux qui sont liés aux situations différentes. Il est possible alors de réussir dans la pratique de la méditation. Concernant les gens qui occupent un poste important dans notre association ― professeur assistant, dirigeant —, ils doivent absolument se détacher de leur ego lié à leur environnement social. Si vous n'êtes pas détachés de votre conscience mentale, comment pouvez-vous convaincre manas de l'être elle-même, elle dont la force d'attachement est plus grande encore ? L'égoïsme et l'attachement à l'environnement social sont liés à la conscience mentale ! Vous, cher confrère de notre association qui avez posé cette question, vous prouvez que vous êtes en train de progresser et de persévérer dans la pratique de la méditation. C'est pourquoi, tout ce que j'explique sur la sagesse des graines, vous pouvez le voir et vous pouvez l'expérimenter. On est donc à présent en mesure de savoir que toutes les pensées incohérentes viennent de manas. Tout le monde sait comment apparaissent ces pensées. Il est donc vraiment possible de pratiquer pour éliminer tous les soucis de l'existence. Une fois que tous les soucis ont été éliminés, il est beaucoup plus facile pour nous d'atteindre le niveau de samādhi.

----

Question : Comment peut-on, d'une manière générale, éliminer toutes les graines karmiques liées aux souillures[23] , lorsque nous sommes dans un état d'observation qui n'est pas associé au langage ?

Réponse : Il existe deux types de graines : un type qui est lié aux souilluress, l'autre au karma proprement dit. Les graines de karma ne peuvent pas être éliminées pendant que nous observons la conscience mentale. Elles s'éliminent une fois seulement que les fruits karmiques se sont réellement présentés. Précisons, sur ce sujet, qu'un grand bénéfice est offert aux êtres illuminés, puisque le fruit de leur karma peut être très léger alors que leur karma d'origine était très lourd. Imaginons que quelqu'un vous doive une importante somme d'argent. Par la suite, cette même personne a appris comment gagner beaucoup d'argent et s'est mise à enseigner à qui le voulait, comment devenir riche. La méthode qu'elle utilise pour s'enrichir est très efficace. Quant à vous, vous êtes venu un jour la trouver pour qu'elle vous enseigne comment gagner de l'argent. Quelque temps passe. Vous avez gagné beaucoup d'argent grâce à sa méthode. Avez-vous, à ce moment-là, envie que celui qui vous a enseigné sa méthode vous rembourse votre dette ? Peut-être allez-vous simplement lui demander qu'il vous rembourse une somme symbolique. On voit, par cet exemple, que cette personne a remboursé ses dettes grâce à de petites sommes, n'est-ce pas ? De même, si vous avez dans votre vie passée fait du mal à quelqu'un, mais que vous avez atteint dans cette vie-ci l'illumination, il se trouve que la personne envers qui vous avez une dette karmique viendra, comme par hasard, vous demander d'apprendre le dharma auprès de vous. Supposons qu'elle sache que vous avez une dette envers elle. Eh bien, dans cette vie, elle ne vous demandera jamais d'en rembourser la totalité. Dans ce cas, vous avez commis un grand péché, mais ce que vous avez à rembourser est léger.

Prenons un autre exemple : un individu rencontre une autre personne très généreuse. S'il ne lui n'offre rien, il se sentira gêné. L'origine de cette gêne vient de ce que, dans une vie passée, il avait une dette envers l'autre personne. Maintenant qu'il l'a rencontrée, il se sent embarrassé sans bien savoir pourquoi. L'autre personne ne sait pas non plus ce qui s'est passé dans cette vie antérieure, elle l'a oublié également mais, quand tous deux se voient, il n'y a pas entre eux un bon « feeling ». Pourtant le premier individu veut apprendre l'enseignement du Bouddha, et est obligé pour cela d'apprendre avec la personne généreuse, dont il est devenu le disciple et avec laquelle il se doit de rester poli. Mais, plus tard, quand il aura atteint l'illumination, il la remerciera du fond du cœur, et leur relation changera dans cette vie-même. Cet exemple montre également qu'un lourd karma peut être transformé grâce à un remboursement léger (notez cependant que, pour les personnes qui possèdent un karma vraiment très lourd et qui souhaitent apprendre le bouddhisme, cela ne fonctionne pas. La raison en est que la personne ne se sent pas à l'aise dans ce milieu). Tout ceci veut dire que vous avez éliminé une partie de votre mauvais karma.

Si jamais vous avez tué accidentellement quelqu'un dans une vie passée, le karma de la personne décédée va s'enregistrer chez la personne, et plus tard il devra être remboursé, quand les conditions nécessaires se présenteront. Supposez que vous avez rencontré dans cette vie cette personne, en principe, vous allez mourir accidentellement par la main de l'autre personne. Mais supposons que dans cette vie vous ayez atteint l'illumination. Cette personne pour étudier le dharma, est devenue votre disciple. Peut-être au début ne vous aimera-t-elle pas trop ; mais votre enseignement du dharma est le vrai, et elle est obligée d'apprendre avec vs. Plus tard, elle atteindra l'illumination, et sera remplie de joie. Le mécontentement de la vie passée va disparaître. Ainsi votre graine karmique est éliminée à ce moment-là. Mais avant qu'elle le soit, le maximum qu'elle puisse faire est de diffamer contre vous. Si le même cas de mort accidentelle arrivait chez une autre personne ordinaire, celle-ci doit rembourser l'une de ses vies. Dans le monde du dharma comme dans notre monde, les choses fonctionnent de manière similaire : vous êtes obligés de rembourser avec les intérêts. Voici l'explication sur les graines de karma : elles vont disparaître quand les fruits karmiques vont se réaliser.

En revanche, les graines des souillures peuvent être éliminées avec la sagesse, lorsqu'on observe notre mental. Celui qui a un très bon niveau de méditation peut éliminer les graines des souillures à travers l'observation de son mental lorsque celui-ci fonctionne sans être lié au langage. Sa concentration doit excellente, sans quoi il lui sera presque impossible d'éliminer grâce à la sagesse ses graines des souillures. C'est pourquoi je recommande souvent d'éliminer leurs graines des souillures grâce à l'observation du mental lié au langage, car dans cet état, pendant vos analyses, vous pouvez convaincre manas plus aisément.

Cependant, pour éliminer les souillures, dans la pratique pour atteindre anutpattika dharma ksanti, le bodhisattva est obligé d'utiliser le langage pour faire les analyses. Par contre, le fait d'utiliser langage ne dérange pas les bodhisattva pendant sa méditation. Pour eux ce n'est pas un obstacle non plus sur le chemin de libération. La pratique pour atteindre l'état d'anutpattika dharma ksanti élimine les graines des souillures, car tous les troubles supérieurs causés par l'ignorance sans commencement. Ces troubles supérieurs causés par l'ignorance sans commencement, ce sont des dharmas très fins et délicats. Si on ne peut pas les analyser à travers le langage, il est impossible de les éliminer. C'est pourquoi un bodhisattva, à travers la pratique pour atteindre l'état d'anutpattika dharma ksanti, a besoin de s'appuyer sur la fonctionnalité du langage. Petit à petit, il élimine ses difficultés à discerner la véritable nature des innombrables phénomènes du monde. Cependant, pour pratiquer la méditation avec la sagesse, faut-il être dans un état sans langage pour éliminer les souillures ? Cela dépend de chaque personne. Il faut voir aussi de quel genre de souillure il s'agit. Par exemple, la douleur de la pensée est une souillure en germe, et l'autre type de souillure est l'incapacité de discerner correctement la véritable nature des innombrables phénomènes du monde, qui est un obstacle à la connaissance[24]. Ce qui se présente alors n'est plus une graine. Aujourd'hui, je n'ai pas beaucoup de temps pour vous expliquer tout ceci en détail.

----

Question : Quelle est la différence entre le nectar et l'eau de grande compassion ?

Réponse : L'eau de grande compassion n'est pas le nectar. Le nectar, c'est la nourriture quotidienne des dieux du monde du désir. C'est une substance constituée de particules très fines issues de l'élément terre. L'eau de grande compassion est également une substance, mais composée d'eau uniquement. Cette eau a reçu la bénédiction obtenue du mantra du bodhisattva Avalokitésvara. Ce mantra est prononcé par les gens afin que quelqu'un puisse recevoir, grâce à cette eau, la protection des dieux protecteurs, voir disparaître sa maladie liée au karma, et retarder le fruit karmique lié à cette maladie, ce fruit karmique va réapparaître plus tard lorsque la personne sera apte à le recevoir. Le nectar n'a pas cette capacité, il peut simplement fournir la force physique nécessaire au profit des dieux du monde du désir, afin qu'ils puissent continuer de s'y faire plaisir. Le nectar n'a pas la capacité de retarder le fruit karmique d'une personne.

----

Question : Si la septième vijñāna manas est partout présente dans l'espace et dans le temps, pourquoi a-t-on l'habitude alors de regarder à gauche ou à droite ? Pourquoi, si elle dispose des facultés d'examiner, de prendre en compte tout ce qu'elle a analysé, et qu'elle est éternelle, commet-on cette erreur ?

Réponse : La septième vijñāna manas ne peut pas être à la fois omniprésente et partout dans le temps. Seule l'est la huitième vijñāna. La septième vijñāna, depuis un temps infini, existe de tous temps, mais elle n'est pas omniprésente, car son fonctionnement est lié aux cinq vijñāna racines, au système nerveux qui relie les organes sensoriels. Pour autant, elle n'est pas présente dans les cinq vijñāna racines externes, ce qui montre qu'elle n'est pas partout. Elle peut réagir uniquement parmi le dharma lié aux objets des vijñāna, sans fonctionner pour autant directement avec elles. C'est pourquoi elle n'est pas présente partout dans les douze entrées. On ne peut pas dire en conséquent qu'elle est partout.

La septième vijñāna manas est en relation avec tous les dharma, mais il est faux d'affirmer qu'elle est partout. Seule l'est la huitième vijñāna. Seule la huitième vijñāna existe depuis une infinité de kalpas[25]. Elle est partout et n'a jamais cessé d'exister. Même dans le nirvāṇa sans reste, elle est encore là. Sauf dans l'état de nirvāṇa sans reste, la septième vijñāna manas, depuis infiniment de kalpas, n'a pas non plus disparu et n'a jamais cessé d'exister. Mais lorsqu'un arhat atteint le quatrième niveau de dhyana, en entrant dans le samādhi de la cessation, sa septième vijñāna disparaît un tout petit peu. Et lorsqu'il entre en nirvāṇa sans reste, elle est détruite pour toujours. Elle n'est donc pas capable non plus d'exister indéfiniment. Avec ces explications, je pense que vous avez une meilleure compréhension de ce qu'est la septième vijñāna.

----

Question : Pourquoi oublie-t-on certaines choses ?

Réponse : Ce frère de notre association sait poser les bonnes questions. Les questions s'enchaînent en étant liées entre elles. Si je n'ai pas la sagesse des graines, ma réponse n'aura pas de sens et je ne pourrai pas la justifier. Concernant la question posée, la septième vijñāna manas est en relation avec tous les dharma et s'y attache. En théorie, elle ne devrait pas pouvoir oublier. Pourquoi oublie-t-on parfois des choses, pourquoi a-t-on envie de mémoriser certains dharma, sans être capable de le faire ? Il existe deux situations qui expliquent que vous ne reteniez pas les choses, et qui n'ont rien à voir avec la nature de manas, qui est reliée à tous les dharma.

Première situation : lorsque vous êtes en contact avec un dharma, que vous êtes en sa présence ou au moment de son processus, votre conscience mentale l'analyse et se dit alors qu'il s'agit de quelque chose d'important, qu'il ne faut pas oublier ce dharma. Toutefois, cette opinion de la conscience mentale n'a pas encore été communiquée, au niveau du langage, à manas. Il suffit cependant que cette pensée existe pour que manas en soit consciente et mémorise le dharma. Elle va en enregistrer le contenu dans votre cerveau. Puis, lorsque vous aurez quitté votre corps, ce contenu sera enregistré dans l'ālayavijñāna, afin qu'il puisse être réinvesti dans une vie prochaine. C'est pourquoi, lorsque seront présentes dans votre prochaine vie les conditions nécessaires à la manifestation de ce contenu, vous le verrez apparaître, s'il est important, en rêve ou en méditation. S'il n'est pas important, il n'y apparaîtra jamais. Par exemple, il vous arrive, à votre réveil, de vous souvenir très clairement de certains rêves. C'est parce que votre conscience mentale pense que votre rêve est très important ; manas l'a alors retenu. S'il est sans importance, elle ne le mémorisera pas. Le comportement de manas, dans les trois mondes du dharma, est donc tributaire des décisions et des analyses de la conscience mentale. Sa caractéristique consistant à s'attacher à tous les dharma, n'est pas libre de la conscience mentale. Le pouvoir d'action de manas est très limité. Elle peut faire des choses extrêmement simples dans l'un des cinq états[26]. Mais cela n'a aucun rapport avec votre question sur la mémoire.

Si vous êtes réveillés et que vous ne vous souveniez pas de votre rêve, cela veut dire que pendant un long moment, manas n'a pas accordé d'importance à vos rêves. Manas n'a pas été convaincue qu'il faille les mémoriser. C'est pourquoi, une fois que vous êtes réveillés, vous ne parvenez pas à vous en rappeler.

Deuxième situation : quand la conscience mentale est en train d'apprendre une méthode ou un enseignement, elle sait qu'il faut impérativement la mémoriser, et manas elle-même le sait. Manas fait des efforts pour cela. Il peut arriver pourtant que, quels que soient vos efforts, vous n'arriviez pas à les mémoriser. La raison en est que la conscience mentale n'a pas tout à fait compris ce que vous deviez assimiler. C'est pourquoi manas a ignoré comment elle pouvait retenir ce qu'il y avait à retenir. Même ensuite, si vous fournissez quelque effort pour vous en souvenir, vous n'y parvenez toujours pas. Cela ne veut pas dire que manas ne dispose pas de la capacité de s'attacher à tous les dharma, mais tout simplement qu'à ce moment-là, elle ne savait pas comment retenir l'information. Il arrive souvent que, quelques temps après, cette information-même qu'avait enregistrée manas apparaisse totalement destructurée, qu'elle ressemble à une sorte de brouillon désordonné. Ceci s'explique par le fait que la conscience mentale ne l'avait pas parfaitement comprise. Mais cela n'est pas dû à l'idée que manas ne posséderait plus alors sa caractéristique d'attachement.

----

Question : Je rencontre souvent des gens atteints de la maladie d'Alzheimer. Comment peut-on guérir cette maladie à travers la pratique ?

Réponse : Il n'y a aucun moyen d'en guérir dans cette vie. Vous pouvez cependant utiliser l'enseignement du Bouddha pour en guérir dans une vie future. Il faut comprendre les caractéristiques propres de cette maladie, pour pouvoir comprendre le sens de ma phrase. La maladie d'Alzheimer est le fruit karmique de la personne qui en est atteinte. D'où vient ce fruit ? Du lien de dépendance qui attache la conscience mentale aux conditions nécessaires du karma. Il faut qu'apparaissent à la fois ce lien de dépendance et les conditions nécessaires à la manifestation d'un fruit karmique, pour permettre à ce dernier de se présenter effectivement. Quelle est la cause de la présence de la conscience mentale ? Dans la huitième vijñāna sont présentes les graines karmiques de la conscience mentale. L'exécution de la huitième vijñāna (notez que seules peuvent comprendre clairement cela les personnes illuminées) et les graines karmiques de la conscience mentale qui y sont stockées, sont la cause qui font apparaître la conscience mentale.

Pour faire apparaître la conscience mentale, d'autres conditions sont nécessaires : les dépendances de la conscience mentale. La première de ses dépendances est celle à manas. Sans la présence de manas, qui est une condition préalable au fonctionnement de la conscience mentale, celle-ci ne peut pas être activée. Son deuxième lien de dépendance, c'est celui qui la rattache aux cinq vijñāna racines externes, c'est-à-dire aux organes sensoriels : les yeux, qui ont la forme de grains de raisins ; les oreilles qui ressemblent à des feuilles de lotus ; le nez qui ressemble à une lanterne, la langue à une demi-lune et le corps lui-même à un tronc. Ce sont là les vijñāna racines externes. Les cinq vijñāna racines internes concernent le cerveau et le système nerveux. Si les cinq vijñāna racines sont détruites, la conscience mentale ne peut pas apparaître non plus. Si une partie de ces cinq vijñāna est endommagée, la conscience mentale ne peut pas fonctionner correctement. Telle personne sera atteinte de la maladie d'Alzheimer si, parmi ses cinq vijñāna racines, la partie qui s'occupe de mémoriser est endommagée ou usée. À ce moment-là, la personne va oublier ses amis, le professeur qu'il avait étant jeune, sa famille... Il va tout oublier à cause de l'endommagement des cinq vijñāna internes, qui a entraîné un dysfonctionnement de la capacité d'analyse. La personne a donc perdu la faculté de mémoriser et a contracté la maladie d'Alzheimer. Autrement dit, si elle peut être atteinte de cette maladie, c'est parce qu'elle possédait déjà, à la naissance, le gêne de cette maladie. Une fois que la maladie est apparue, elle n'a de recours possible pour soulager les symptômes, que les médicaments. Si, dans l'avenir, certains médicaments étaient créés pour soigner totalement cette maladie, cela signifierait que les fruits karmiques de l'être humain seraient réduits, à tel point que la maladie pourrait disparaître totalement.

Cela pourrait signifier encore que, dans votre prochaine vie, vous n'auriez plus la maladie d'Alzheimer. Dans ce cas, il est vaut mieux ne pas critiquer ni diffamer, même légèrement, le véritable enseignement du Bouddha, ni les personnes illuminées. Sinon dans votre prochaine vie, vous serez atteints de la maladie d'Alzheimer. Si quelqu'un calomnie ainsi de façon très grave, il ira assurément en enfer et y subira une souffrance particulière et très profonde durant un long moment, et se trouvera dans l'impossibilité de se réincarner sur la terre.

Si vous voulez éviter, dans une vie future, d'être atteint par cette maladie, il ne faut donc absolument pas diffamer contre le vrai dharma (même si c'est à la légère), ni contre ceux qui le propagent. Si vous respectez cela, lorsque vous serez nonagénaire, votre conscience mentale fonctionnera aussi bien qu'en ce moment : elle sera très vive et intelligente. La conscience mentale de mon père âgé de quatre-vingt-treize ans, était très vive avant de quitter ce monde. Il était en effet profondément respectueux des trois trésors, et n'avait jamais diffamé contre eux. Du coup, ses cinq vijñāna racines internes furent toujours préservés : ce furent ses fruits karmiques. Cela lui a permis d'éviter tout obstacle au bon fonctionnement de sa conscience mentale. C'est pour cette raison que, si vous voulez soigner la maladie d'Alzheimer, vous ne pouvez, grâce au bouddhisme, le faire que dans votre prochaine vie, mais jamais dans votre vie actuelle. L'explication que je vous donne se base exclusivement sur le dharma du Bouddha. On ne parle pas ici de pouvoirs surnaturels. Mais il peut arriver qu'un individu soit atteint de la maladie d'Alzheimer et qui, possédant un excellent karma, ait reçu la bénédiction du Bouddha ou d'un grand bodhisattva. Il se peut alors que sa maladie soit guérie parfaitement dès cette vie.

Ces textes sont une reproduction écrite de l'enregistrement de la conférence du maître Xiao PingS, tenue à l'Association des bouddhistes « Yi-Lien », située Tao-Yuan, Taïwan, durant le mois de Décembre 2000.

[1]Ce sutra expose les préceptes des bodhisattvas et la question du karma.
[2]Dans leur ordre de gravité : Premier crime : tuer un être humain ou un être d'un autre monde ; Deuxième crime : voler ; Troisième crime : rapports sexuels non consentis ou illégitimes ; Quatrième crime : mentir ; affirmer publiquement être illuminé, quand c'est faux ; Cinquième crime : absorber de l'alcool jusqu'à l'ivresse ; Sixième crime : parler avec mépris des péchés des bodhisattvas ; Septième crime : écraser les autres pour affirmer un sentiment de supériorité ; Huitième crime : radinerie ; Neuvième crime : colère ; Dixième crime : mépriser les trois trésors (bouddha, dharma, sangha).
[3]Les caractéristiques du corps physique, qui sont les signes, dans le bouddhisme, du grand homme. Le Bouddha en a trente-deux.
[4]L'histoire qui suit est tirée du chapitre 2 du Mahāprajñāpāramitāśāstra sutra (Pilindavatsa and the Ganges River Spirit (T25.71al7-29 [fasc.2]). Elle a été racontée par le bodhisattva Nagarjuna
[5]Zen, en chinois.
[6]Deuxième grande étape de la pratique, après celle de l'illumination.
[7]La tradition chinoise veut qu'une statue représentant l'esprit de la maison, y soit posée.
[8]Qualité de l'ego, qui forme des attachements à toutes les discriminations produites par la conscience mentale, et les considère comme étant vraies (alors que tout est faux).
[9]Les objets des six vijñāna  internes sont les six vijñāna transformées en substances mentales : donnons, à titre d'exemple, une chanson que vous avez « dans la tête ». La vijñāna de l'ouïe a été donc intériorisée, transformée en substance mentale, pour que vous puissiez l'entonner dans votre esprit.
[10]Les cinq messages sensoriels.
[11]Ce passage assez difficile mérite une explication : la huitième vijñāna communique avec l'ego et la conscience mentale, en leur envoyant sans cesse des images mentales (qui sont le fruit d'une transformation des cinq sens et de la conscience mentale, en substance mentale, et que le maître Xiao Pings nomme « images objectales internes »). En outre, elle continue parallèlement d'envoyer à l'ego des informations issues des cinq sens (ce que le maître Xiao Pings nomme « images objectales externes »), afin que l'ego puisse demeurer en contact constant avec les messages sensoriels perçus par les cinq sens (les cinq objets des vijñāna), comme par exemple la sonnerie du réveil ou le fait que quelqu'un vous secoue pendant que vous dormez. Durant ce processus, la conscience mentale nie quant à elle l'existence de ces messages sensoriels.
[12]Dans les monastères bouddhistes, petites plaques de bois indiquant que l'heure du réveil est venue.
[13]Métaphore pour signifier que le monde est perçu comme un film, sachant qu'un film, dans une salle de cinéma, n'est qu'un jeu d'ombre et de lumière fabriqué par le projecteur.
[14]Instant avant l'apparition d'une pensée (littéralement : instant avant qu'une phrase soit prononcée). C'est une méthode du bouddhisme chan pour ôter les doutes.
[15]Toutes pensées qui surgissent involontairement.
[16]Des conséquences karmiques lourdes.
[17]Le vrai bouddhisme chan permet, non d'atteindre le samādhi, mais de trouver le véritable moi, c'est-à-dire la cause fondamentale de toutes choses.
[18]École dont la technique consiste à répéter la formule (ou mantra) amitabha bouddha. C'est la technique la plus populaire en Asie.
[19]En chinois, 無生法忍. Il s'agit d'un état dans lequel le pratiquant demeure tranquille dans le dharma sans commencement et n'a pas de doute au sujet de l'illumination.
[20]Cf La Douce Pluie du nectar, p.28
[21]Le moi « humain », à ne pas confondre avec le tathagatagarbha.
[22]Pratique de méditation bouddhiste consistant à demeurer concentré, durant chacun de ses actes, sur l'image, puis sur le concept de bouddha.
[23]Souillures liées à l'ego : inconforts causés par les obsessions pour le monde du désir : désirs pour les cinq agrégats,  les cinq plaisirs du désir, le désir de l'état de méditation, le désir d'avoir des pouvoirs surnaturels, le désir de devenir un être céleste.
[24]L'ignorance sans commencement au sujet du monde du dharma, qui ne empêche de comprendre la réalité de tathagatagarbha, est un obstacle pour la personne qui souhaite atteindre la sagesse, prajñā.
[25]Plus longue unité de temps dans l'Inde ancienne.
[26]Sommeil, coma, agonie, samādhi ou samādhi de la cessation.

Page d'accueil·Index·Précédent